Pendant de longues années, j’ai caressé le rêve de devenir journaliste. J’ai toujours été passionnée par ce métier fondamental pour la vivacité de nos démocraties.
Finalement, la vie a fait que je me suis dirigée vers le secteur associatif et ensuite vers la politique. Je reste toutefois très attentive au sort des journalistes dans le monde.
C’est ainsi que j’ai suivi avec une grande attention l’examen au Parlement fédéral d’une proposition de résolution relative à la sécurité des journalistes.
Le jour du vote en plénière, nous apprenions la libération des 41 journalistes retenus en otages par les rebelles houthis au Yémen.
Cette prise d’otage démontre, par son ampleur et sa violence, à quel point les journalistes exercent un métier tout aussi rigoureux qu’indispensable à notre compréhension du monde et des violations des droits humains qui s’y perpétuent.
Ces journalistes sont victimes des violations qu’ils dénoncent. En remplissant leur mission, ils risquent, chaque jour, des représailles pouvant aller, dans certains régimes, jusqu’à la privation de liberté et de soins élémentaires ou à la mort.
Notre Parlement ne pouvait passer sous silence cette alarmante situation et se devait de relayer les préoccupations du Conseil de sécurité de l’ONU et du Conseil de l’Europe auprès de notre gouvernement mais aussi auprès des gouvernements de nos pays partenaires.
Plus que jamais, les slogans tels que “Je suis Charlie” doivent être traduits en condamnations fermes des attaques délibérément commises à l’encontre des journalistes, ainsi qu’en mesures proactives, concrètes, à même de protéger les journalistes.
La presse, c’est le chien de garde de notre démocratie. Du moins si et seulement si la liberté de la presse est en mesure de s’exercer dans des conditions de travail décentes, en toute sécurité, conditions sine qua non d’un journalisme professionnel et pleinement indépendant.
La proposition de résolution s’inscrit dans cette démarche.
Elle demande également au gouvernement de mettre en place une protection légale des lanceurs d’alerte lorsqu’ils s’adressent à la presse.
Cette protection, mon parti l’appelle de ses voeux depuis plus d’un an. Nous estimons en effet que le statut de journaliste doit être étendu à celui de lanceurs d’alerte et que la loi du 7 avril 2005 relative à la protection des sources journalistiques doit définir et englober de manière claire ce statut. Tel est d’ailleurs l’objet d’une proposition de résolution adoptée au Parlement régional bruxellois le 17 novembre dernier.
La liberté de la presse ne se limite pas à l’expression finale d’une information ou d’une opinion. Elle couvre également la collecte de l’information, sans quoi cette liberté serait réduite à peau de chagrin. Le gouvernement devra donc, dans l’exécution de la présente proposition de résolution, légiférer dans le sens d’un anonymat total des lanceurs d’alerte, et ce afin qu’ils ne puissent plus être pénalement poursuivis pour vol, violation du secret professionnel et du secret des affaires.
Dans un souci de cohérence, nous avons déposé plusieurs amendements à ce texte.
Ceux-ci visaient à:
- rendre compte de la situation rencontrée par les journalistes pris en otage dans des zones de conflit, et à définir des critères de négociation en vue d’obtenir leur libération;
- rendre compte aussi, de la situation des journalistes arrêtés et arbitrairement détenus en Turquie depuis le coup d’Etat avorté du 15 juillet 2016;
- reprendre les recommandations adoptées le 29 juin 2017 par le Conseil de l’Europe relatives à l‘influence politique sur les médias et les journalistes indépendants;
- appeler le gouvernement à travailler à une réforme du droit du travail et/ou des commissions paritaires permettant de prendre en compte la situation particulière des journalistes face aux licenciements arbitraires ou aux représailles dont ils peuvent faire l’objet et de leur assurer des conditions de travail dignes de leur mission.
Ces ajouts visaient à souligner l’urgence du débat que pose très justement la présente proposition de résolution mais aussi la nécessité d’assurer une sécurité tant physique que sociale aux journalistes.
C’est ni plus ni moins l’avenir de la profession, la qualité de nos informations et la stabilité de notre démocratie qui étaient ici en jeu.
J’ai alors dû constater que si la majorité nous a félicité pour ses amendements, ils ont malgré tout préféré les rejeter, parce que venant de l’opposition. Une curieuse façon de consolider de manière constructive la protection des journalistes…